Le Grand Paris continue son développement !
Des dizaines de milliers de logements nouveaux, des millions de mètres carrés de bureaux, de commerces et d’équipements publics. La mise en place du Grand Paris Express, ce nouveau réseau de transports en commun autour de la capitale, est en passe de déclencher une mutation urbaine de très grande ampleur en Île-de-France, comme il n’en existe qu’une ou deux par siècle. «C’est le plus grand projet urbain d’Europe», souligne Jean-François Monteils, président du directoire de la Société du Grand Paris (SGP).
Concrètement, plus de 200 km de rails vont être posés, pour bâtir quatre nouvelles lignes de métro (les 15, 16, 17 et 18) et prolonger la ligne 14. Il n’y a pas eu de chantier comparable depuis la création du RER, qui, dans les années 1960 et 1970, avait permis de construire près de 600 km de voies (dont 80 km en souterrain). L’objectif du Grand Paris Express est de relier des territoires qui ne le sont pas actuellement, et de compléter le RER avec un réseau de transport en commun en rocade autour de Paris. Il deviendra ainsi possible d’aller très rapidement de l’aéroport de Roissy au quartier d’affaires de la Défense, puis au pôle scientifique du plateau de Saclay. De quoi accélérer l’installation et le développement sur divers points du territoire francilien d’activités à haute valeur ajoutée, aujourd’hui très concentrées dans Paris intra muros. Ce projet a donc une valeur à la fois politique et économique. Il a été d’ailleurs lancé en 2010 par le président de la République d’alors, Nicolas Sarkozy.
La Société du Grand Paris, qui assure la maîtrise d’ouvrage de ce nouveau réseau, a été créée cette année-là. Les enjeux financiers sont énormes. En 2020, les coûts du nouveau réseau étaient estimés par le Sénat à 42 milliards d’euros. Le financement est assuré par des taxes, des emprunts et des opérations immobilières. En dehors des stations du nord de la ligne 14, déjà livrées, les mises en services des nouvelles lignes vont s’échelonner entre 2025 et 2030.
68 quartiers de gare
Jusqu’à présent, le travail a surtout consisté à percer les tunnels. «Le creusement du premier tronçon de la future ligne 15 sud est terminé. Les tunneliers, qui en ont foré les 37 km, ont été démontés. Nous faisons la démonstration de la compétence de l’ingénierie française», se félicite Jean-François Monteils. Désormais, seulement six de ces engins sont en action autour de Paris, contre 20 en 2020. «On sort du génie civil. On passe à une nouvelle phase, où il s’agit d’installer les équipements ferroviaires», explique le patron de la SGP.
Les enjeux de développement urbains commencent également à apparaître. Le Grand Paris Express, c’est 68 gares, et donc 68 quartiers de gare. «Ces derniers sont définis comme étant dans un rayon de 800 m autour de chaque équipement, explique Jean-François Monteils. Ce qui représente 32 millions de m2 de surface de développement disponibles.» Certains quartiers nouveaux sont déjà sortis de terre, comme à Clichy-Batignolles, dans le 17e arrondissement de Paris (3400 logements, 140.000 m2 de bureaux, 30.000 m2 de commerces). Mais le mouvement va s’accélérer et déborder largement des frontières de Paris intra muros. Dans une étude, l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) recense 20 millions de surfaces de plancher restant à bâtir, sur les 32 millions programmés. 40 % concernent des logements (soit 127.000 logements), 30 % des bureaux et 30 % des équipements, commerces et autres activités.«Il n’y a pas de corrélation systématique entre l’état d’avancement des projets urbains et les horizons de mise en services des gares du Grand Paris Express», précise l’Apur.
Convaincre les élus locaux
Car ce sont les collectivités locales qui ont la main sur ces projets. «L’État a donné la direction, notamment en matière de logements, de rééquilibrage territorialet développement économique, explique le patron de la SGP. Mais ce sont les élus locaux qui ont la légitimité.» Et le pouvoir, puisqu’ils octroient les permis de construire.
La Société du Grand Paris a toutefois un rôle à jouer dans le domaine de l’aménagement urbain, car elle dispose d’importantes emprises foncières, de l’ordre de 1 million de m2 de surfaces de plancher. «Il faut donc que nous expliquions ce que l’on souhaite faire dans le développement urbain», précise Jean-François Monteils. C’est ainsi que la SGP peut décrocher des permis.
Tout n’avance toutefois pas à la vitesse voulue, notamment en raison des aléas politiques. Le nouvel exécutif PS à Saint-Denis et Plaine Commune, l’agglomération qui regroupe les communes du nord de Paris, a ainsi remis en cause la ZAC (zone d’aménagement concertée) Pleyel. Or cette zone est stratégique, car située à côté de la future gare Pleyel, qui sera la plus importante du futur réseau de métros. Des projets ont été suspendus, en attendant la révision de la ZAC. Les nouveaux élus ont toutefois conscience de l’importance du projet, et souhaitent l’adapter, avec moins de bureaux et davantage de logements notamment.
Si les maires ne se saisissent pas des projets, le rééquilibrage urbain voulu par les concepteurs du Grand Paris pourrait en partie manquer sa cible. C’est tout l’enjeu des années à venir.
Source: Lefigaro