Crédit immobilier : les taux toujours en hausse

Selon les chiffres de la Banque de France publiés mercredi, les taux moyens pratiqués par les établissements bancaires pour les prêts à l'habitat ont atteint 1,26 % en mai, contre 1,19 % en avril.
 
Tels les cyclistes du Tour de France, les taux du crédit immobilier grimpent à toute vitesse . Selon les chiffres de la Banque de France publiés mercredi, les taux moyens pratiqués par les établissements bancaires ont atteint 1,26 % en mai, contre 1,19 % en avril. En juin, ils ont même atteint 1,33 %, selon les estimations avancées du régulateur bancaire.
 
Ce niveau reste historiquement bas. Il y a dix ans, les taux moyens dépassaient 3 %. Par ailleurs, ils restent inférieurs à l'inflation, qui s'élevait à 5,8 % en juin. Mais leur progression rapide, que les banques expliquent par la hausse de leurs coûts de financement, alimente l'inquiétude des courtiers et des banques sur le risque de blocage du marché du crédit .
 
A leur niveau actuel, les taux moyens se rapprochent en effet un peu plus du taux d'usure, qui correspond au taux maximal autorisé pour un crédit. Le 1er juillet, ce taux fixé chaque trimestre, est passé à de 2,43 % à 2,60 % pour les prêts immobiliers à taux fixe de 10 à 20 ans. Pour les professionnels, de plus en plus de dossiers justifieraient un taux plus élevé et risquent tout simplement de ne pas être acceptés.
  
Un niveau très fort de production
Cependant, pour le moment, la Banque de France ne constate toujours pas ce phénomène : le taux de croissance des crédits à l'habitat a atteint 6,8 % en mai, pour une production de 27 milliards d'euros. « Soit le plus haut niveau atteint sur les cinq dernières années », souligne l'institution. Les projections de la Banque de France portent la production de juin à 26,4 milliards, soit encore un niveau très élevé.
 
« C'est tout à fait normal, juge Pierre Chapon, fondateur du courtier en ligne Pretto. Cette production correspond à des débouclages de projets qui remontent à plusieurs mois. Le blocage lié au taux d'usure ne sera réellement visible qu'en septembre. » Selon une étude publiée par le courtier mardi, 18 % des prêts réalisés en 2021 n'auraient pas pu être réalisés cette année du fait de la lente montée des taux d'usure, comparativement à la vitesse à laquelle les taux nominaux augmentent.
 
Inertie du taux d'usure
« Cela fait des années que nous dénonçons le décalage du taux d'usure lié à la méthode de calcul, fustige Ludovic Huzieux, à la tête d'Artemis Courtage. Le fait qu'il soit calculé chaque trimestre par rapport au trimestre précédent créé un vrai décalage ». L'ensemble des courtiers partage cette position. Ils réclament à cor et à cri de déroger à la règle en vigueur en faisant usage des « circonstances exceptionnelles » prévues par les textes.
 
Mais la Banque de France, tout comme Bercy, ont jusqu'ici préféré ne pas adopter cette solution, rappelant que le taux d'usure est un outil de protection des ménages contre le surendettement. Le modifier, à plus forte raison en période de trouble économique, est inenvisageable pour les autorités. Par ailleurs, la Banque de France ne cache plus son agacement face aux déclarations qu'elle juge infondées des courtiers .
 
Pour autant, le gouvernement suit le sujet de près et veut s'assurer que l'accès à la propriété reste largement possible, y compris pour les ménages modestes. « On reste très vigilant et on étudiera avec beaucoup d'attention l'évolution des taux dans les prochains mois en fonction de l'évolution du contexte macro-économique », indiquait la semaine dernière une source proche des autorités.

 


Source : Les Echos